C’est un euphémisme de constater que le contexte concurrentiel n’a jamais été aussi difficile. Aucun secteur, aucun marché ne semble épargné. La lutte est de plus en plus féroce pour convaincre et séduire des clients de plus en plus exigeants et zappeurs. Et ça serait une erreur d’analyse que de tout mettre sur le dos de la crise économique actuelle. Sur tous les marchés il est possible d’observer ce qu’on pourrait appeler un véritable « choc de concurrence » : les barrières à l’entrée des marchés s’effritent et aucun marché ne ressemble plus à une citadelle imprenable pour peu que la promesse d’une rentabilité soit au rendez-vous. Coca Cola dans la chaussure, Amazon dans le Cloud Computing et le paiement, Ikea dans l’hôtellerie…, les exemples sont légion d’entreprises qui vont chercher des relais de croissance bien au-delà de leur marché d’origine. Cette course à la part de marché a pour conséquence de déstabiliser les acteurs historiques en place et de rendre plus difficile le pilotage stratégique des entreprises d’autant qu’on assiste en parallèle à un double phénomène :
– une démultiplication des offres gratuites et à bas prix qui ont tendance à détruire la valeur des marchés et par ricochet à comprimer les marges des entreprises. (voir cette vidéo pour plus d’analyse sur ce point).
– une tendance à l’imitation et à la copie qui affaiblit le pouvoir différenciant des offres et renforce dès lors l’argument prix. Avec l’avènement d’Internet, l’information sur les offres circule en temps réel sur une échelle mondiale et il est beaucoup plus aisé de surveiller et copier ses concurrents : un produit performant et innovant a de moins en moins de temps pour capter les fruits de sa « juste rente » avant d’être imité. Les exemples récents de procès multiples sur des problèmes de propriété intellectuelle montrent que les brevets ne sont pas une réponse suffisante à ce problème d’imitation permanente (1).
Dans cet environnement menaçant et instable, difficile pour le dirigeant de garder la tête froide et de ne pas céder à la tentation de la « facilité » avec le recours systématique à l’imitation de ses concurrents et à la compression des coûts pour lutter par les prix. Lorsque les difficultés sont là et que la concurrence se renforce, le plus simple est souvent en effet de comprimer au maximum ses coûts pour baisser ses prix afin de garder ses clients quitte à hypothéquer sa création de valeur future !
Et pourtant le dirigeant doit avoir la force mentale de garder le cap même lorsque le navire tangue. Deux mots d’ordre doivent s’imposer à lui : différenciation à tout prix et défense de la valeur de ses produits et services. Plutôt que de chercher systématiquement à baisser ses coûts et ses prix, le dirigeant doit d’abord se focaliser sur la création de valeur pour les clients avec l’ambition de pouvoir maintenir, voire d’augmenter à terme ses prix. Il y a là un véritable enjeu de créativité et de prise de risque avec la volonté de ne pas se cantonner à des stratégies « me-too » avec le seul argument prix comme promesse de valeur. Le propos n’est pas ici de dénoncer la recherche d’une meilleure productivité et une baisse des coûts mais d’affirmer que cette stratégie est rarement une fin en soi et qu’elle ne peut pas se faire au détriment d’une recherche permanente de valeur supplémentaire pour le client. Dans trop de secteurs, on ne propose que du prix aux clients et ceux-ci finissent par « acheter au kilo ». Il est impératif de leur redémontrer la valeur des offres pour qu’ils consentent à payer un sur-prix. Et cette valeur doit être réellement perçue par les clients ! C’est d’ailleurs là que ça se complique : encore trop souvent la différenciation des offres n’est réellement « différenciante » que vu de l’interne par les équipes de l’entreprise. De même, la valeur est parfois difficilement lisible (et donc valorisable) à l’extérieur du point de vue du client. Ce dernier aura dès lors tendance à privilégier l’offre la moins chère puisqu‘il ne percevra pas la valeur ni l’intérêt de l’offre « potentiellement plus riche ». Il y a là des réserves de création de valeur importantes quels que soient les marchés considérés : que ça soit sur les attributs de valeurs supplémentaires à imaginer pour enrichir les offres ou parfois plus simplement sur la valorisation d’attributs existants mais mal perçus ou évalués par les clients.
Pour le dirigeant, il est crucial de trouver les moyens de challenger les produits et services de son entreprise et de permettre cette remise en question permanente : les marchés évoluent, les attentes des clients changent, les technologies introduisent des ruptures et il est indispensable de penser dès aujourd’hui le coup d’après et d’identifier les sources de création de valeur de demain.
En conclusion, il ne faut pas oublier que la stratégie c’est aussi une question d’état d’esprit et de posture. Être conquérant et en posture offensive sur son marché peut permettre d’identifier des sources de valeur insoupçonnées. Les réponses ne seront pas simples à trouver mais si le point de départ est la volonté de création permanente de valeur pour le client et la défense systématique des prix, cela poussera les équipes et l’entreprise à la créativité et à l’innovation pour justifier ce sur-prix aux yeux des clients. Cette ambition, difficile à tenir surtout face à une concurrence qui joue uniquement sur le prix, permettra néanmoins de maintenir une pression stimulante et bénéfique au sein de l’entreprise si elle est bien pilotée en interne. ID Strat peut vous appuyer dans cette dynamique à la fois en stimulant votre réflexion stratégique mais aussi en vous accompagnant dans la déclinaison opérationnelle des options stratégiques retenues.
Frank Benedic – ID Strat / Septembre 2014
(1) A noter que la marque constitue encore à ce titre un rempart efficace pour peu qu’elle soit bien positionnée sur son territoire et suffisamment nourrie par l’innovation.